Détruire un astéroïde avec une bombe nucléaire est plus difficile que prévu
Peut-on se protéger de l'impact d'un gros astéroïde en le faisant exploser avec des armes nucléaires ou en le déviant au moyen de l'impact d'un corps assez massif ? Pour répondre à cette question, il faut au moins estimer le comportement des astéroïdes, à savoir leur capacité à se fragmenter ou non. C'est ce que font des chercheurs avec des ordinateurs.
De Meteor avec Sean Connery à Armageddon avec Bruce Willis, il est d'usage de faire exploser avec des armes nucléaires les astéroïdes de taille au moins kilométrique sur le point de détruire la civilisation en tombant sur Terre. En fait, l'idée est très risquée car faire exploser un astéroïde en approche pourrait ne faire que multiplier les impacteur de grande taille et certains le resteront suffisamment pour atteindre le sol, contrairement à ce qui s'est passé dans le cas du bolide de Tcheliabinsk.
La bonne solution, comme l'expliquait Jean-Pierre Luminet dans une interview qu'il avait donnée à Futura, est de repérer suffisamment tôt un géocroiseur menaçant et de dévier sa trajectoire avec un tracteur gravitationnel. Toutefois, cela n'a pas empêché certains d'étudier ce qui pourrait se produire si l'on décidait d'employer des têtes thermonucléaires pour passer de la science-fiction à la réalité ou simplement d'envoyer un projectile non destructeur, dont l'impact changerait la trajectoire de l'astéroïde dangereux. La dernière étude en date sur ce sujet se trouve dans un article du journal Icarus. Elle a été menée par Charles El Mir et K.T. Ramesh, de l'université Johns-Hopkins, conjointement avec Derek Richardson, professeur d'astronomie à l'université du Maryland.
Les trois hommes ont mené des simulations plus réalistes de ce qui se passerait pour un astéroïde soumis à une explosion nucléaire ou plus exactement dans le cas présent, qui subirait l'impact d'un autre astéroïde de taille similaire. Au début des années 2000, des calculs sur ordinateur, avec une rencontre entre un astéroïde de un kilomètre et un autre de 25 kilomètres à une vitesse relative de 5 km/s, avaient conduit à la conclusion que les deux objets seraient bien pulvérisés.
Une vue d'artiste d'une collision entre astéroïdes. © Don Davis/Southwest Research Institute
Un noyau fragmenté entouré d'un tas de gravats
Dans les nouvelles simulations conduites par les chercheurs états-uniens, l'échelle des processus de fragmentation lors d'une telle collision a été affinée. Ainsi, on peut mieux prendre en compte le comportement des matériaux constituant deux astéroïdes et en particulier la vitesse de propagation des fractures.
Il s'est avéré que les astéroïdes étaient plus résistants que prévu et qu'il devait subsister un important noyau rocheux, bien que fracturé. Le reste des matériaux, brisés et éjectés par l'impact, subissait alors l'effet du champ de gravitation de ce noyau et s'accrétait donc de nouveau aux astéroïdes.
Ce résultat n'est en fait pas surprenant. Il a été possible de calculer la densité de certains astéroïdes et plusieurs semblent poreux, ce qui indique qu'ils sont des assemblages au moins partiels de fragments avec des vides entre eux. Cela a permis de classer ces corps célestes en plusieurs familles.
Il y a ainsi les astéroïdes fracturés tels Ida, Éros et Pulcova dont la porosité est de l'ordre de 15 à 25 % et les « rubble-piles » (tas de gravats, en français) dont la porosité atteindrait des valeurs de 30 à 45 %, comme c'est le cas de Phobos, Mathilde et Eugenia.
Cela concorderait bien avec l'idée que lors des collisions subies entre astéroïdes, plusieurs ne sont pas détruits mais adoptent effectivement une double structure, à savoir une enveloppe de débris autour d'un noyau certes fissuré mais encore solide. On devrait en apprendre plus à ce sujet avec les missions AIM et Dart.
Asteroid Impact Mission (AIM) est l’une des missions candidates de l’ESA en cours de conception préliminaire. AIM serait lancée en octobre 2020 en vue d’un rendez-vous avec le système d'astéroïdes binaires Didymos, qui, à 11 millions de kilomètres de la Terre, en sera relativement proche en mai 2022. Une lune de 170 mètres de diamètre, surnommée « Didymoon », est en orbite autour du corps principal de 800 mètres de diamètre. Si elle est approuvée, AIM serait également la contribution de l'Europe à la mission Asteroid Impact & Deflection Assessment (Aida). À la fin de 2022, la contribution de la Nasa, appelée Dart (Double Asteroid Redirection Test) arrivera à l'astéroïde double avant de s’écraser au centre de Didymoon avec une vélocité d’environ de 6 km/s. AIM observerait de près l’impact de Dart contre Didymoon. Ses constatations, en conjonction avec les observations depuis la Terre permettraient d’évaluer la taille et la profondeur du cratère laissé par l’impact, et de vérifier les prédictions des modèles théoriques. © European Space Agency, ESA
Source web : futura sciences
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